Homélie de Noël de Mgr Aubry : « Faire réussir la vie »
Article mis en ligne le 27 décembre 2011

par Mgr Gilbert Aubry

Mgr Gilbert Aubry a prononcé cette homélie au cours de la messe de Noël célébré le 24 décembre 2011 en l’église du Saint-Esprit, à Trois-Mares, messe diffusée en direct sur Réunion Première.

Les bergers, la Lumière, les anges, un nouveau né emmailloté dans une mangeoire, un « petit Jésus »… cela fait rêver les enfants… les petits et les grands. Mais ce n’est pas qu’un rêve, c’est une réalité fondamentale, un bouleversement qui renouvelle notre conception de Dieu et notre conception de la dignité humaine.

Commençons par rêver avec un conte que j’ai reçu dans mes vœux de Noël. Je pense qu’il va beaucoup parler aux enfants, à nos cœurs d’enfants.

 [rouge]Quel cadeau à Jésus ?[/rouge]

Lorsque les bergers s’en furent allés et que la quiétude fut revenue, l’enfant de la crèche leva sa tête et regarda vers la porte entrebâillée. Un jeune garçon timide se tenait là… tremblant et apeuré.

— Approche, lui dit Jésus pourquoi as-tu si peur ?

— Je n’ose… je n’ai rien à te donner, répondit le garçon.

— J’aimerais tant que tu me fasses un cadeau, dit le nouveau-né.

Le petit étranger rougit de honte.

— Je n’ai vraiment rien… rien ne m’appartient ; si j’avais quelque chose, je te l’offrirais… regarde.

Et en fouillant dans les poches de son pantalon rapiécé, il retira une vieille lame de couteau rouillée qu’il avait trouvée.

— C’est tout ce que j’ai, si tu la veux, je te la donne.

— Non, rétorqua Jésus, garde-la. Je voudrais tout autre chose de toi. J’aimerais que tu me fasses trois cadeaux.

— Je veux bien, dit l’enfant, mais que puis-je pour toi ?

— Offre-moi le dernier de tes dessins.

Le garçon, tout embarrassé, rougit. Il s’approcha de la crèche et, pour empêcher Marie et Joseph de l’entendre, il chuchota dans l’oreille de l’enfant Jésus.

— Je ne peux pas… mon dessin est trop moche… personne ne veut le regarder !

— Justement, dit l’enfant dans la crèche, c’est pour cela que je le veux… Tu dois toujours m’offrir ce que les autres rejettent et ce qui ne leur plait pas en toi.
"Ensuite, poursuivit le nouveau-né, je voudrais que tu me donnes ton assiette.

— Mais je l’ai cassée ce matin ! bégaya le garçon.

— C’est pour cela que je la veux…Tu dois toujours m’offrir ce qui est brisé dans ta vie, je veux le recoller…
"Et maintenant insista Jésus, répète-moi la réponse que tu as donnée à tes parents quand ils t’ont demandé comment tu avais cassé ton assiette…

Le visage du garçon s’assombrit, il baissa la tête honteusement et, tristement, il murmura :

— Je leur ai menti… J’ai dit que l’assiette m’avait glissé des mains par inadvertance ; mais ce n’était pas vrai… J’étais en colère et j’ai poussé furieusement mon assiette de la table, elle est tombée sur le carrelage et elle s’est brisée !

— C[bleu]’est ce que je voulais t’entendre dire ! dit Jésus. Donne-moi toujours ce qu’il y a de méchant dans ta vie, tes mensonges, tes calomnies, tes lâchetés et tes cruautés. Je veux t’en décharger… Tu n’en as pas besoin… Je veux te rendre heureux et sache que je te pardonnerai toujours tes fautes.[/bleu]

Et en l’embrassant pour le remercier de ces trois cadeaux, Jésus ajouta :

— [bleu]Maintenant que tu connais le chemin de mon Cœur, j’aimerais tant que tu viennes me voir tous les jours…[/bleu]

« Tu connais le chemin de mon cœur » qui est un cœur de miséricorde. Chacun de nous, d’une manière ou d’une autre, casse des assiettes dans sa vie et nous n’arrivons pas à recoller les morceaux. Soit que nous ne voyons pas clair sur ce qu’il faut faire, soit que nous n’avons pas les moyens et la force d’agir, soit les trois en même temps. Nous pouvons être perdus, désespérés parfois. Il y aurait de quoi d’ailleurs dans un monde en crise dont les médias se font écho, crise qui angoisse tous nos dirigeants, les chefs d’entreprise, les artisans, ceux qui perdent leur emploi, ceux qui sont au chômage, les jeunes.

Nous faisons la fête en des temps difficiles et incertains comme pour nous donner un peu de lumière et de joie, à Noël et au Nouvel An. Mais quel sens a la fête si ce n’est pas pour sortir d’un climat permanent de violence, de grossièretés, de haine meurtrière jusque dans des couples ? Que de femmes victimes de violence conjugale, de maris aussi. Que d’enfants et d’adolescents qui ne sont plus aimés, n’ont plus de repères et sont livrés à eux-mêmes jusqu’à détester la vie parfois et basculer dans le suicide. Que de drames dans nos familles, dans nos communautés ecclésiales mêmes, dans notre société. Ça ne peut pas continuer comme ça !

Où nous mène une civilisation des loisirs et de la frivolité quand il faut que les économies se restructurent au service de la dignité humaine avec les moyens de vivre pour tous, quand il faut repenser nos modes de vie en fonction de l’essentiel, en fonction de la solidarité et de la responsabilité ? Nous sommes un peu comme des gens perdus en mer, en montagne, dans la vie, et qui devraient crier au secours.

Crier… Crier au secours pour être sauvés, de quoi et par qui ? Sauvés et d’abord, me semble-t-il, de cette quasi impossibilité aujourd’hui de vivre des relations humaines apaisées dans le stress et une sorte de harcèlement permanent. Sauvés du non-sens, du Mal sous toutes ses formes et de la mort. Par nous-mêmes, nous sommes incapables de recoller les morceaux d’assiettes cassées. Et c’est justement au moment où nous avons conscience du besoin d’être sauvés, parce ce que nous avons conscience d’être perdus, que nous les chrétiens, à Noël, nous chantons « Un enfant nous est né…un sauveur nous est né ! »

 [rouge]Jésus conduit au Père et aux frères[/rouge]

C’est ridicule diraient certains. Peut-être oui aux yeux de certains ! Mais pour nous qui avons mis notre foi en Jésus-Christ nous savons que sa résurrection est à l’œuvre en chacun de nous, en chaque famille, dans la société, dans le monde. A l’époque de la naissance de Jésus, qui était Jésus ? Un inconnu, alors qu’en réalité, il est le Verbe de Vie qui se coule dans la chair humaine pour conduire chaque être humain à la hauteur de Dieu, dans le cœur de Dieu. Il nous conduit vers son Père et notre Père, il nous conduit vers nos frères et nos sœurs. La dignité humaine n’a pas de frontières. Chaque être humain est unique, un trésor unique et il n’y a qu’une seule race, la famille humaine. Ici et partout ailleurs Pour maintenant et pour l’éternité. « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’Il aime ». Nous ne sommes pas faits pour la destruction, nous sommes faits pour faire réussir la vie ! Notre foi, notre religion ne nous donnent pas de solutions techniques, mais à partir de la présence de Jésus qui grandit en chacun de nous et entre nous, nous sommes invités à vivre une spiritualité de la communion qui peut changer la vie. Avec la méditation de la Parole de Dieu, avec les sacrements, avec les responsabilités partagées. Notre programme peut se formuler ainsi : bien faire Eglise et mieux vivre ensemble dans la société avec tous les autres.

[bleu]En ce soir de Noël, nous prions Dieu de faire lever sa lumière dans nos cœurs, dans nos relations, sur notre île, sur le monde.[/bleu]

[bleu]— Qu’il nous donne le regard du cœur : chacun de nous et tous, nous sommes appelés à être ses enfants bien-aimés par Jésus, dans le souffle de l’Esprit.[/bleu]

[bleu]— Qu’il nous rende attentifs aux joies et aux peines les uns des autres pour cheminer ensemble là où nous vivons en famille et dans la société[/bleu].

[bleu]— Qu’il nous aide à donner sa place au frère et à la sœur dans nos communautés, dans toutes nos relations.[/bleu]

[bleu]Alors nous marcherons vers la paix en compagnie de Jésus, le « Prince de la paix » avec l’amour, la vérité, la justice et la liberté. Dieu nous donne suffisamment de talents à développer ensemble pour que nous puissions nous entraider, subvenir à nos besoins et faire réussir la vie, avec Lui.[/bleu]

Chers amis, vous qui êtes ici, vous qui êtes avec nous grâce à la radio et à la télévision, je vous souhaite un Noël de lumière et de paix, à vous et à tous ceux qui vous sont chers, Joyeux Noël.


Appels à dons, bénévolat

puceContact puce RSS

2009-2024 © Diocèse de La Réunion - Tous droits réservés
Haut de page
Réalisé sous SPIP
Habillage ESCAL 4.3.3
Hébergeur : OVH