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Les contes de la lune vague après la pluie
Article mis en ligne le 1er juin 2011

par La Rédaction d’Église à La Réunion

Dans le cadre de « Film et spiritualité », le Centre Saint-Ignace propose dimanche 21 août, de 17h30 à 20 heures, salle Jean de Puybaudet, le film Les contes de la lune vague après la pluie. La diffusion sera suivie d’un débat.

[bleu]Les contes de la lune vague après la pluie[/bleu]

Film de Kenji Mizoguchi (Ugetsu monogatari) Japon, 1953, avec Machiko Kyo, Masayuki Mori, Kinuyo Tanaka, Sakae Ozawa, Mitsuko Mito. Lion d’argent au Festival de Venise.

A la fin du XVIe siècle, dans le Japon sauvage des environs du lac de Biwa, deux frères vivent paisiblement, malgré la guerre des clans qui fait rage. Genjuro est potier, Tobei paysan. Le premier rêve de faire fortune, le second ambitionne un destin plus héroïque et veut embrasser l’état de samouraï... Ils quittent leurs femmes, Miyagi et Ohama, et partent affronter leur destin à la ville…

Quelle folie pousse un paysan et un potier à abandonner femmes et enfants à la terreur de la guerre civile ? Folie du pouvoir pour l’un, qui espère troquer sa condition de serf contre celle de samouraï. Folie de l’argent pour l’autre - folie plus profonde quoique moins flagrante pour être mieux partagée - qui sait combien la guerre profite au commerce ? Tous deux participent, chacun à son niveau et selon ses forces, à la folie par excellence, laquelle consiste à fermer les yeux sur une réalité pour s’engager dans les contrées ô combien plus vastes de l’irréel et du faux - comme le résume le dicton : lâcher la proie pour l’ombre. Ou saint Jean : « La lumière est venue dans le monde et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière » (Jn 3, 19). Cette fable dramatique et cruelle raconte le destin de deux hommes qui comprendront leur folie en rencontrant le malheur et découvriront trop tard que seul l’amour offre une chance de salut dans ce monde impitoyable. Pour donner cette leçon de sagesse bouddhiste, il oscille entre crudité réaliste et poésie fantastique, tout en rendant un incessant hommage aux femmes, qui savent le prix du sacrifice comme l’art du pardon.

Ce film dont l’action est située dans le Japon médiéval n’est en rien daté ni circonscrit à un lieu particulier. La tragédie qui s’y joue est celle inlassablement répétée, toujours et partout, par chaque ressortissant de l’espèce humaine. Mizoguchi filme ces légendes sans jamais se (ni nous) raconter d’histoires. Son trait, sûr et incisif, loin de toute joliesse, a la beauté âpre des choses vraies. Il utilise la caméra pour y dessiner des plans dont les fulgurantes évidences rappellent la pureté des traits de pinceau des maîtres de l’estampe. Ici, nous sommes plongés dans le grand art, celui dont les secrets échappent à toutes les analyses. Jamais de pittoresque ou d’anecdotes clinquantes, mais toujours la vérité brute des êtres et des choses, restituée avec sobriété et efficacité. Cependant, derrière cette simplicité apparente des cadrages, des mouvements de caméra, se cachent une accumulation de détails, de matières, une richesse qui a l’élégance de rester invisible. L’art de Mizoguchi, c’est cela, une simplicité foisonnante.

« Le chef-d’œuvre de Mizoguchi, le chef-d’œuvre du cinéma japonais, un des plus beaux films de l’histoire du cinéma. C’est une somme où convergent et s’additionnent les tendances les plus opposées de l’art, ses sources d’inspiration les plus diverses. Il n’est pas possible de parler de lui que par énumération : il est, de quelque point de vue que l’on se place, à la fois ceci et cela, et quelque chose de plus encore : leur conciliation. C’est à la fois le mythe si grec de l’Odyssée et la légende celtique de Lancelot, un des plus beaux poèmes d’aventure et d’amour-fou, un des chants les plus fervents qui aient été composés en l’honneur du renoncement et de la fidélité, un hymne à l’Unité, en même temps qu’à la diversité des apparences. » (Eric Rohmer, Les Cahiers du Cinéma)


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