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Les 16-29 ans dans la société et l’Église à La Réunion
Article mis en ligne le 10 mars 2018
dernière modification le 13 mars 2018

par Père Stéphane Nicaise, sj

Résultats du sondage #KODO (Koi ou di ou) proposé aux 16-29 ans sur les réseaux sociaux, commentés par le père Stéphane Nicaise.

Vous vous souvenez qu’en septembre, il y a eu le passage du groupe Hopen, avec un grand concert de louange ici-même. Le collectif Réveil qui l’a fait venir a lancé un sondage auprès des 16-29 ans en décembre, intitulé Koi Ou Di Ou ? Avant de l’analyser, je vais donner quelques indications sur la place des 16-29 ans dans la société et dans l’Église à La Réunion.

 Quel est le pourcentage des 16-29 ans à La Réunion ?

Environ 1/5e de la population, mais en baisse régulière : 22,2 % en 2009, 20,8 % en 2014, soit environ 175.000 personnes sur 842 000.
Ce pourcentage des 16-29 ans est en baisse alors que le nombre d’habitants à La Réunion augmente : nous serons 1 million à l’horizon 2040, grâce au plus grand nombre de naissances, environ 10.000/an, sur celui des décès, environ 4.000/an.
Cette augmentation naturelle de la population est cependant freinée par le départ des personnes qui vont s’installer ailleurs, et qui n’est pas compensés par des nouveaux arrivants aussi nombreuses.
Cette érosion est forte chez les 16-29 ans, plus nombreux à partir qu’à arriver. Ainsi, entre La Réunion et la métropole, de 2012 à 2016, chaque année, 3700 jeunes sont partis, pour seulement 1600 arrivés, soit une perte de 2100 jeunes par an.
Mais, pour sauter la mer, il faut être diplômé, ce qui n’est pas le cas d’un grand nombre de jeunes Réunionnais qui ont connu le décrochage scolaire, et bien souvent des difficultés sociales dans leurs familles, liées au logement, au chômage, à la monoparentalité.
En 2016, c’est un tiers (32 %) des 15-29 ans qui n’ont aucun diplôme, et 44 % des moins de 25 ans qui sont au chômage. Et c’est environ 40 000 jeunes qui sont ni scolarisés, ni en formation, ni en recherche d’emploi. Sur les 175.000 16-29 ans de la population de 2014, c’est énorme !
Notons enfin que le vieillissement de la population contribue à la baisse du pourcentage des 16-29 ans.

Retenons que les 16-29 ans représentent environ 20% de la population, et que cette tranche d’âge subie une forte érosion.

 Comment évolue la part des 16-29 ans dans l’Église à La Réunion ?

Je viens d’évoquer le nombre important de naissances à La Réunion, environ 10.000 par an. Mettons à côté de ce nombre, ceux des baptêmes, des premières communions et de confirmations.
De 2011 à 2016, d’un côté il y a une centaine de naissances en moins, de l’autre une baisse de 500 baptêmes, de 800 premières communions, et de 100 confirmations, dont des confirmés qui font désormais partie des 16-29 ans (environ 8000/ an), mais qui sont nombreux à ne plus pratiquer.
La forte diminution des premières communions est un phénomène nouveau qui indique un changement de comportement dans les pratiques religieuses. Aujourd’hui chacun se fait de plus en plus sa propre religion, et souvent il passe dans plusieurs religions. C’est une conjugaison qui s’accélère de la liberté de conscience et du pluralisme religieux. Et puis il y a une certaine montée de l’athéisme.
Intéressons-nous aussi aux mariages religieux catholiques. De 2011 à 2016, ils passent de 1752 à 1594, soit une baisse de 158 mariages, mais peu significative car les variations d’une année sur l’autre sont parfois d’une à deux centaines. Et ces variations concernent aussi les mariages civils qui se situent entre 2700 et 2900 par an.
Sur ce nombre, et cela intéresse directement notre réflexion, moins d’un tiers des mariages civils sont contractés par les moins de 30 ans (environ 900/2700), avec un pic entre 25 et 29 ans (environ 700/900). C’est sûrement la même chose avec les mariages religieux, à vérifier. Et si oui, nous devinons que tant que les couples sont en concubinage, ils ne se sentent pas très à l’aise dans les paroisses.

Retenons que l’évolution de ces dernières années est marquée par une plus grande dispersion religieuse, en raison de choix personnels plus précoces, y compris celui de se déclarer athée.

 Que retirer du sondage « Koi ou di ou ? » à destination des 16-29 ans ?

C’est un sondage fait sur Facebook du 4 au 30 décembre 2017, avec 18 questions, une différente posée chaque jour, avec un choix à cocher parmi 3 ou 4 propositions. De 780 réponses à la première question, on tombe à 55 à la dernière. Nous ne savons pas à combien de questions un sondé a répondu, et nous ne connaissons pas la répartition par âge des sondés entre 16 et 29 ans.
Des réponses faites à trois questions, je déduis que le noyau dur des sondés est constitué par des croyants pratiquants. A la Q.3, Quel chrétien es-tu ?, plus de 61 % (61,32%), soit 352 sur 574, disent participer à la messe tous les dimanches, et/ou fréquenter des groupes de prière. A la Q.12, Pourquoi vas-tu à l’Église ?, plus de 84 % (84,85%), 280 sur 330 cochent « pour écouter et approfondir la Parole », ou « pour recevoir le corps du Christ ». Et à la Q.13, plus de 87 % (87,54%), 232 sur 265 disent connaître assez bien les sacrements.
Ce sont sans doute les mêmes qui répondent majoritairement à la Q.6 : Si tu devais faire un état des lieux de la foi des jeunes à La Réunion, tu dirais qu’ici on est ? Plus de 69 % (69,63%), 431 sur 619 qualifient les jeunes de « croyants peu pratiquants », pour seulement 77 (12,44%) qui cochent « très croyants, très pratiquants ».
Et c’est sans doute aussi de ce noyau dur de croyants pratiquants que viennent la plupart des 55 réponses à la Q.18, la seule où il y avait à écrire sa propre réponse en exprimant une priorité pour l’Église diocésaine. De 3 mots à 10 lignes, les propositions, globalement, sont peu originales, alors que trois des dix-sept premières questions pointent le « besoin d’un nouvel élan » (Q.4), la nécessité « d’apporter une touche de neuf à l’Église » (Q.8), et d’une Église qui « innove » (Q.9).
Or sur 55 réponses à la Q.18, 7 sondés ne savent pas quoi dire, et la plupart ne proposent que d’améliorer ce qui existe en donnant tout simplement une plus grande place aux jeunes : plus de rassemblements et de pèlerinages de jeunes, plus de chorales de jeunes dans les paroisses, une meilleure attention et considération des jeunes par les prêtres et les personnes engagées dans les paroisses, des liturgies plus rythmées et avec plus d’échanges.

Je retiens cependant trois propositions :

  1. « Accepter la communion pour les personnes en concubinage depuis un moment et qui au fond de leur cœur souhaitent se marier. Je pourrais revenir à l’Église le cœur léger et m’y épanouir de nouveau ». J’imagine ce sondé plus proche des 29 ans que des 16. Il pointe un vrai enjeu de pastorale et d’évangélisation.
  2. « Des temps d’échange avec les jeunes sur des questions de société pour qu’on puisse mieux vivre en tant que chrétien dans notre société ». Avec une autre proposition qui parle « d’agir en tant que chrétien dans la vie de tous les jours », ce sont les seules à parler du rapport de la foi au monde, de l’engagement du croyant dans la cité, bref tout ce que la doctrine sociale de l’Eglise développe.
  3. Un seul sondé parle de l’usage de la langue créole à privilégier dans la messe, la louange, le chant et la traduction de la Bible. Nous sommes loin des revendications de générations antérieures !

Je termine sur une remarque à partir de l’ensemble du sondage :
Nous sommes bien en présence d’un public de jeunes qui, et c’est normal, cherche son épanouissement et sa place dans la société et dans l’Église. Ces jeunes sont capables d’entendre le discours de l’Église lorsqu’elle leur parle des talents personnels à exercer et du désir d’aimer, et d’aimer son prochain. La Q.5 qui fait référence à ces valeurs cumule 584 réponses. Que l’Église soit ainsi perçue par des jeunes comme un lieu ouvert à la recherche du sens à donner à leur vie, c’est très important, essentiel !


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